Ateliers du drive 2019 : les parcours qui transforment la grande distribution

Atelier Drive 2019

Ce jeudi 26 septembre se déroulait le rendez-vous annuel des experts du drive et du e-commerce, les Ateliers du Drive, présenté par Olivier Dauvers et la rédaction de Linéaires.

L’occasion de faire un point chiffré sur les pratiques des courses en ligne en croissance et de décrypter les prochaines tendances qui transformeront rapidement la grande distribution. Drive, livraison, drive piéton, Amazon… voici ce que nous avons retenu de cette journée riche en données et en analyses.

1. Le drive poursuit sa croissance et fidélise une cible jeune et familiale

Le succès du drive n’est plus à prouver. Séduisant désormais un quart des Français, ce circuit continue à progresser de 7% par an, quand tous les autres formats chutent en volume (HM, proximité…). Son chiffre d’affaires atteint ainsi près de 7 milliards d’euros. Dans un contexte assez morose pour les PGC, avec +1,6% de croissance (IRI), le drive tire donc son épingle du jeu, en particulier au détriment des hypermarchés.

Ce circuit s’installe durablement dans les foyers : d’après Kantar, 55% de la croissance du drive est désormais due à des acheteurs de plus en plus fidèles, qui augmentent leur fréquence de visites et leur panier moyen. Le reste de la croissance est portée par les nouveaux clients recrutés, surtout grâce à la poursuite de l’ouverture de nombreux points de vente.

Plébiscité par une cible jeune et familiale, avec bébé ou enfants, pour sa praticité et son gain de temps, le drive se confirme cette année encore comme un circuit de la routine. Il est fréquenté en particulier les semaines travaillées et pour acheter des produits routiniers. Les distributeurs et les marques peinent ainsi à susciter l’impulsion d’achat sur ce parcours. Si les catégories bébés (couches, petits pots…) sont sur-performantes, un fort potentiel de chiffre d’affaires reste à exploiter sur de nombreux marchés comme la confiserie, l’alcool, ou encore l’hygiène beauté. Les distributeurs rivalisent alors de formats publicitaires à proposer aux industriels pour mettre en avant leurs produits : cross merch, check out, mots clés de recherche, etc.

Pour compléter le portrait de la cible drive, IRI et Kantar remarquent également une forte affinité à la fois au bio et aux bons plans. Des caractéristiques certainement liées au profil familial des adeptes du drive :

  • Les produits bio représentent 8% du C.A. de ce parcours, presque le double qu’en hyper et supermarchés (4,6%). La croissance de ces produits est également plus forte en drive : +29% de C.A. par an d’après IRI (contre +20% en HM/SM). Des opportunités sont à saisir pour certaines catégories encore sous-représentées en bio sur ce circuit.
  • Côté bons plans, ce sont plus de 25% des dépenses qui sont réalisées sous promotion sur le drive d’après Kantar (vs 15% en magasin), et près de 40% des dépenses totales concernent des produits MDD.

Pas encore complètement mature, le circuit drive continue à recruter et à faire évoluer son offre pour répondre au mieux aux attentes des consommateurs.

Les parts de marché des enseignes drive évoluent
E.Leclerc drive reste largement leader avec 50% du marché et +7% de croissance de C.A.
Carrefour drive rattrape son retard à grande vitesse avec +27% de croissance, pour passer en 2ème position devant Auchan drive.

2. Livraison : la course à la logistique pour répondre aux attentes des clients et gagner le marché

Avec l’adoption du drive par les Français et donc la généralisation des pratiques du e-commerce dans les courses du quotidien pour plus de praticité, on pourrait s’attendre à une explosion des commandes avec livraison à domicile. Si le service ne décolle pas encore, les distributeurs semblent à deux doigts d’avoir trouvé la recette miracle et l’on peut s’attendre à voir les pratiques évoluer dans les mois à venir.

Si la livraison ne fonctionne pas aujourd’hui en France, c’est parce que l’offre des distributeurs est en décalage avec les attentes des clients : coût du service exorbitant ou prix des produits très élevés sur les sites e-commerce, réception de la commande à J+2, plages d’attente du livreur trop larges, erreurs dans les produits livrés…

En effet, le manque de savoir-faire logistique des distributeurs pour la livraison à domicile les conduit à des durées de préparation longues (picking en magasin pour certains), des coûts de transports élevés et une faible productivité. Ils sont donc encore contraints de proposer à leurs clients un service cher, peu efficace et peu rentable pour eux.

E.Leclerc lui-même bascule en ce moment sa stratégie sur le marché parisien de la livraison (E.Leclerc chez moi) au drive piéton (E.Leclerc Relais). Amazon non plus n’a pas encore réussi à percer sur le marché PGC : malgré un gain de part de marché sur l’hygiène beauté, la firme américaine est aujourd’hui 23 fois moins grosse que l’enseigne E.Leclerc sur l’alimentaire d’après Kantar.

Cependant la forte demande de gain de temps et de plus de praticité dans les courses du quotidien est bien là et les distributeurs semblent décidés à la saisir. En témoignent les très gros investissements de la majorité des enseignes pour réduire les coûts et le temps de préparation : d’immenses entrepôts automatisés voient le jour autour des grandes villes. Monoprix s’associe avec le géant de la logistique Ocado à une heure de Paris (Fleury-Mérogis), Carrefour installe des entrepôts près de Paris, Lyon, Marseille ou Lille. Ces plateformes de préparation de commandes devraient réduire le temps de préparation d’une commande à 5 minutes pour 50 produits, en baissant les coûts et en évitant les erreurs.

Des recherches sont également en cours sur les flottes de livraison : Carrefour teste à Marseille les vélos-cargos électriques Freegone capables de transporter 300 kg et de livrer la commande dans le quart d’heure prévu avec un service plus écologique. L’enseigne a également expérimenté un service de livraison collaborative entre particuliers « Merci voisins », sans succès pour le moment. De son côté, Intermarché s’associe avec les livreurs à vélo de la start up Shopopop. Verra-t-on bientôt des tests de livraison par voitures autonomes comme en Californie ?

L’apprentissage de la logistique par les distributeurs traditionnels et leurs investissements colossaux pour réduire les coûts et augmenter l’efficacité devraient rapidement leur permettre de proposer une offre de livraison plus en adéquation avec les attentes des consommateurs d’aujourd’hui. Affaire à suivre.

3. La bataille du drive piéton : menace pour la proximité urbaine

En attendant de mettre en place le bon modèle pour la livraison, les distributeurs développent un autre format pour apporter leurs commandes aux clients près de chez eux : le drive piéton.

Le concept ? Les consommateurs choisissent leurs produits de grande consommation en ligne et viennent les chercher à pied dans des magasins dédiés au retrait en centre-ville.
La cible ? Une clientèle jeune et citadine, qui n’utilise pas régulièrement de voiture.
Les avantages ? Au-delà du gain de temps, ce sont les prix et le choix de l’hypermarché en centre-ville !

L’essor de ce format est également lié au développement des plateformes de préparation de commandes qui permettent de livrer les produits des entrepôts de la périphérie dans un temps record au point de retrait, alors que les débuts se faisaient avec du picking des produits en magasin.

Après le succès rapide des premiers drives piétons E.Leclerc et Auchan à Lille, ces formats fleurissent dans les grandes villes : 300 drives piétons ont ouverts en quelques mois ! Carrefour est en tête, avec 105 points de retraits à Paris. Ils sont alimentés par sa nouvelle plateforme de préparation de commande d’Aulnay sous-bois. E.Leclerc entre également dans la course avec un objectif de 4 E.Leclerc Relais par arrondissement parisien.

Ces drives piéton s’installent juste à côté des magasins de proximité, avec une offre beaucoup plus large et des prix défiants toute concurrence en centre-ville. Même si les magasins de proximité restent un format incontournable pour les achats de dépannage et de dernière minute, il y a fort à parier que le drive piéton va rapidement grignoter des parts de marché à ses concurrents citadins sur les produits de fond de placard.

Surtout que certaines enseignes comme Carrefour testent en ce moment de nouveaux concepts, en proposant des produits de dépannage complémentaires en point de retrait drive piéton ou une offre de frais traditionnel et des plats préparés.

L’antinomique « drive piéton » a donc tous les attributs pour transformer profondément le paysage de la distribution urbaine dans les mois à venir.

4. En conclusion

Drive, livraison, drive piéton… avec le développement et l’adoption de plus en plus massive des nouveaux formats, la transformation de la grande distribution se poursuit et s’accélère. La digitalisation permet d’apporter aux clients du gain de temps et du confort dans leurs courses du quotidien.

Le principal moteur du changement est donc le consommateur : les distributeurs le placent désormais au centre de leur stratégie et ont bien compris que dans un monde de plus en plus concurrentiel, l’enjeu est de répondre à ses attentes pour le fidéliser, quel que soit le format. On peut donc s’attendre à voir cohabiter les formats, pour répondre à tous les besoins et toutes les situations, mais aussi à voir arriver de nouveaux parcours : avec les nouvelles technologies la créativité n’a pas de limite pour faciliter toujours plus la vie des clients et les fidéliser.