5 questions pour bien comprendre le quick commerce

Face à une société qui va de plus en plus vite grâce à l’accélération digitale, l’immédiateté est devenue essentielle pour rester compétitif et offrir des expériences d’achat qui répondent aux attentes des consommateurs. Dans ce contexte, et propulsé par la crise sanitaire et les confinements, le Quick commerce s’est vite développé et s’installe dans le quotidien de certaines populations. C’est sans surprise qu’en 2021, l’activité du quick commerce a affiché une croissance de +86% par rapport à 2020.

Pour essayer de bien cerner ce phénomène qui fait fureur et qui bouleverse le secteur de la grande distribution, voici quelques repères :

1. Qu’est-ce que le Quick commerce, et qui sont ses acteurs ?

Livrer les courses en 10 min, telle est la promesse des acteurs du Quick commerce qui viennent concurrencer les commerces de proximité. Sur leurs applications, on peut se procurer les produits qu’on a oublié tout à l’heure au supermarché, des courses pour un repas du soir ou pour un apéro improvisé. Ce modèle repose donc sur deux axes propres à l’e-commerce : la rapidité et la flexibilité des livraisons, avec comme objectif principal d’offrir aux clients des courses de manière quasi-instantanée.

Aujourd’hui, nous comptons de nombreuses start-ups en France opérant dans le Quick commerce. Nous vous présenterons une liste des acteurs représentant un poids important dans l’industrie grâce à leurs levées de fonds :

  • Gorillas: start-up fondée en Allemagne, valorisée à près d’un milliard d’euros lors de sa dernière levée de fonds en octobre 2021 et considérée donc comme licorne
  • Getir: acteur turc, pionnier de ce marché avec six ans d’existence et une levée de fonds de 550 millions de dollars
  • Flink: start-up allemande, qui a réalisé une nouvelle levée de fonds pour un montant de 750 millions de dollars et est donc valorisée aujourd’hui à 2,1 milliards de dollars
  • Dija : jeune pousse britannique cofondée par deux anciens de chez Deliveroo en 2021, avec une levée de fonds de 20 millions de dollars.

2. Quel est le fonctionnement de ces plateformes ? Et quelles sont ses atouts ?

Ces applications se basent sur un système de « dark store1 » ; des entrepôts installés judicieusement sur des lieux stratégiques dans les zones urbaines fortement peuplées. La plupart de ces « dark stores » sont des anciens supermarchés fermés au public et comptant 2000 à 4000 références numérotées et géolocalisées pour faciliter et optimiser le « picking2 ». Ces « dark stores » ont donc la triple casquette distributeur-entrepôt-supermarché.

Les commandes sont donc préparées au sein des entrepôts par des préparateurs de commandes, pour ensuite les confier aux livreurs. Ces plateformes embauchent directement ses travailleurs en CDI. Pour le transport, la plupart de ces entreprises ont choisi les vélos électriques fournis aux livreurs.

Force est de constater que les acteurs de ce nouveau circuit de distribution disposent de plusieurs atouts et de plusieurs arguments à faire valoir pour séduire le consommateur d’aujourd’hui :

– Optimisation de temps :
  • Les courses sont livrées en moins de 15 min
  • Le choix des produits est restreint par conséquent le prise de décision est plus rapide
  • Pas de temps passé en magasin
  • Parcours d’achat plus fluide et rapide
  • Le client peut passer sa commande où et quand il veut
 – Allégement de la charge mentale :
  • Courses effectuées au jour le jour
  • Pas d’anticipation ni planification
  • Livraison de produits de dépannage donc pas de stress si vous oubliez un article !
– Livraison écologique et socialement responsable
  • Courses livrées sur des vélos électriques
– Horaires étendus
  • Livraisons jusqu’à 2 h du matin chez certains acteurs

3.Quel est le business model des acteurs du quick commerce ?

Il existe différents modèles économiques au sein de cet univers :

– Des entreprises de livraison express telles que Gorillas, Flink avec leur propre réseau de « dark stores » répartis dans toute la ville, collaborant avec plusieurs enseignes de distribution. Les frais de livraisons constituent donc leurs marges de bénéfice.

– Des startups qui collaborent avec un seul retailer de manière exclusive bénéficiant ainsi de tarifs compétitifs sur les produits permettant de dégager une marge sur le prix de vente des produits en plus des frais de livraison. Ex : Gorillas et Monoprix.

– Des services de livraison hyper localisés comme Uber Eats ou Glovo qui jouent plutôt le rôle d’intermédiaire entre les enseignes et le consommateur. Dans ce cas de figure, ces entreprises offrent uniquement le service de transport, et la rapidité dépend également de la livraison par le vendeur.

 

4. À quelles conditions le quick-commerce peut-il être rentable ?

Aujourd’hui, les acteurs du quick commerce partagent un objectif de croissance et non de rentabilité, puisque à l’heure actuelle, leur modèle économique n’est pas tout à fait rentable.

Une multitude de leviers s’offrent aux acteurs de Quick Commerce afin de devenir rentables, une fois la taille critique atteinte :

  • Augmenter les frais de livraison d’environ 1 à 2 €
  • Tirer le panier moyen vers le haut pour atteindre 35 euros le panier vs 22,1 euros aujourd’hui
  • Réduire les offres promotionnelles (codes promo, offre parrainage…), très élevées aujourd’hui car elles constituent un outil d’acquisition et de recrutement
  • Négocier de meilleures conditions d’achat avec les fournisseurs afin d’augmenter la marge brute de 30 à 40 %
  • Maximiser le temps des livreurs afin que chaque livreur puisse livrer 3 à 4 commandes par heure au lieu de 2
  • Réduire les coûts marketing une fois que le service est populaire

5. Quel avenir pour le quick commerce ?

Aujourd’hui, le phénomène du Quick Commerce se popularise de plus en plus et se consolide déjà malgré la récence de ses acteurs. Que ce soit en France, mais aussi aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne, ou en Chine. Selon les prévisions, ce marché pourrait même atteindre les 10 à 15% des dépenses alimentaires d’ici 2025, ce qui correspond à une part de marché énorme étant donné que le e-commerce ne représente aujourd’hui que 9%.

Ces derniers mois, nous avons observé des start-ups misant sur les capitaux apportés par des investisseurs pour grandir et assurer l’hypercroissance, avant de se mettre en vente ou de permettre des acquisitions au capital. Ces investisseurs poursuivent une stratégie dite de « blitzscaling ». Il s’agit donc de se lancer dans une course à la croissance pour prendre l’avantage sur ses concurrents. L’idée : devenir le plus gros et tout emporter

Le scénario probable est que le nombre d’acteurs diminue progressivement jusqu’à devenir des oligopoles au niveau global européen, au niveau de chaque pays, au niveau de chaque zone urbaine.

De plus en plus d’enseignes souhaitent se positionner également sur ce nouveau segment, pour garantir une présence sur tous les parcours d’achat qui s’offrent au consommateur d’aujourd’hui, à savoir Carrefour, avec « Carrefour Sprint » né grâce à un partenariat avec Uber Eats et Flink (ex cajoo).

Pour d’autres distributeurs, l’essor de la livraison de courses en moins de 20 minutes est plutôt vu comme une menace inattendue, sur laquelle il leur est, à l’heure actuelle, difficile de s’aligner.

Ce nouveau marché qui s’est accaparé plus de 7 milliards de dollars en levées de fonds rien que sur l’année 2021, risque de provoquer une guerre entre ses acteurs qui multiplient les acquisitions et les collaborations. Affaire à suivre…

 

dark store1 :  commerce de détail fermé au public qui sert d’entrepôt
picking: préparation de commandes